Tribulations d’une libraire-maman
Ou maman-libraire au choix.
Hier soir, au magasin, alors que je me préparais avec délectation à finir ma journée, le cerveau en mode "économie d'énergie", à exactement 18h45, soit un quart d’heure avant la fermeture, et après une journée morte, bidon, insupportable et lourde d’attentes, une cliente, étudiante, entre :
- B’soir, z’auriez-pas des livres sur la précarité de l’occupation du domaine public maritime ?
- Ouais, tiens madame, j’en avais justement un dans ma poche !
NaAAan, ma politesse (ou bien peut-être est-ce la peur de perdre mon sacro-saint CDI ?) me l’interdit.
Je dis plutôt, entre mes dents, un faux sourire accroché à ma face en première phase de décomposition :
- Je ne pense avoir cela en rayon, mais je vais faire une recherche bibliographique !
Pourquoi, pourquoi, pourquoi MOOOAAA ! J’étais si près du but, à quelques minutes de la libération…. Et NAN.
Il faut savoir que la crise et Internet, qui pourrissent le marché du livre et le domaine universitaire, dans lequel j’œuvre en particulier, me font des journées longues, mais loOOOooonnngue, à attendre les clients ! Alors, c’est peu dire, que je décampe de la bouche de l’enfer livresque a 19h00 petantes !
Quelques minutes plus tard, je lui annonce, la mine parfaitement désappointée, qu’aucun livre n’existe précisément sur ce sujet là. La cliente, effarée, me répond :
- Mais, c’est pas peussibleeuuh ! Déjà, mon prof (paroles d’évangile) m’a a-ssu-ré qu’il y avait des tas de bouquins dans ce domaine, et en plus c’est hyper important et incontournable comme sujet : la précarité…. (je vais pas tout répéter, hein, ça m’a assez fatigué comme ça !), il doit forcément y avoir des références… »
Après 20 minutes de recherches acharnées, sur des tas de bases de données, dans les livres en stock, qui contenaient, pour partie, des éléments relatifs à son sujet, elle a fini par admettre, qu’en effet, il fallait…qu’elle PARTE !
La caisse, le bus*, la marche à pied, et me voilà rentrée au bercail. Ce bon et joyeux chez-moi, où mon chéri doit m’attendre dans la félicité avec notre « chaire de notre chaire », mignonne dans son pyjama, prête à manger et jouer avec môman. Et NAN ! J’ouvre la porte et entends « petit monstreauxplantes » hurler dans sa chambre pendant que son père tente de lui enfiler son pyjama. Sur ce, papa m’entendant, tous les deux déboulent, bibou en brassière, calmée par la mastication féroce de son doudou, et chéri, des cernes jusqu’au menton, dépité : « Elle a mal aux dents…la pauvre » tout en pensant (je le connais) : « Elle m’use ta fille ». Je vous laisse imaginer le reste de la soirée, bébé chouineuse, qui, s’acharnant sur un croûton de pain pour soulager ses gencives, refuse d’avaler son petit-pot. Papa et maman aussi en forme qu'après une improbable ascension de l’Everest à cloche pied !
Tout compte fait, le sujet sur la précarité des occupations de domaine publique maritime est tout à fait pa-ssio-nnant.
* hé oui, le matin c’est la voiture, le soir le bus : on n’a qu’une voiture et c’est chéri qui récupère bibou le soir avec. Toute une organisation !